{"id":449,"date":"2018-08-10T12:02:47","date_gmt":"2018-08-10T10:02:47","guid":{"rendered":"http:\/\/didouqen.com\/?p=449"},"modified":"2020-12-07T13:38:50","modified_gmt":"2020-12-07T13:38:50","slug":"promotion-des-droits-de-lhomme-et-soutien-du-developpement-rural-au-maroc-une-combinaison-gagnante","status":"publish","type":"post","link":"https:\/\/wordpress-haf.ddev.site\/promotion-des-droits-de-lhomme-et-soutien-du-developpement-rural-au-maroc-une-combinaison-gagnante\/","title":{"rendered":"Promotion des droits de l\u2019homme et soutien du d\u00e9veloppement rural au Maroc : une combinaison gagnante"},"content":{"rendered":"\r\n
Gal Kramarski<\/em><\/p>\r\n\r\n\r\n\r\n Introduction <\/strong><\/p>\r\n\r\n\r\n\r\n Il existe un lien intrins\u00e8que entre les droits de l’homme et le d\u00e9veloppement. Le d\u00e9veloppement, dans de nombreux cas, implique un processus de s\u00e9curisation de l’acc\u00e8s aux droits, et leur mise en application, alors que l’existence de droits, elle, tend \u00e0 am\u00e9liorer les processus de d\u00e9veloppement.<\/p>\r\n\r\n\r\n\r\n Les droits de l’homme et les libert\u00e9s sont inscrits dans la Constitution marocaine comme des \u00ab constantes immuables \u00bb<\/em> (article 175). Depuis la ratification de la Constitution en 2011, ces droits sont chaque jour un peu plus respect\u00e9s. Bien qu’il existe aujourd’hui une loi sp\u00e9cifique qui garantit l’\u00e9galit\u00e9 des droits entre les hommes et les femmes, Moudawanat Al-Osra (la Moudawana)<\/em>, de nombreuses femmes vivant dans le monde rural n\u2019en tirent pas encore de b\u00e9n\u00e9fices, en particulier dans les zones les plus recul\u00e9es. Nous nous demandons souvent pourquoi les d\u00e9cisions gouvernementales, les lois et les programmes qui visent \u00e0 promouvoir le d\u00e9veloppement ont du mal \u00e0 trouver un \u00e9cho dans ces r\u00e9gions \u00e9loign\u00e9es. Cela est-il la cause du retard dans le d\u00e9veloppement des collectivit\u00e9s rurales ? L\u2019application de ces lois stimulera-t-elle le d\u00e9veloppement ? Et si oui, comment ?<\/p>\r\n\r\n\r\n\r\n Mus par ces interrogations, le personnel et moi-m\u00eame \u2013 je suis \u00e9tudiante \u00e0 l’Universit\u00e9 h\u00e9bra\u00efque de J\u00e9rusalem et actuellement en stage aupr\u00e8s de la Fondation du Haut Atlas \u2013 avons men\u00e9 une recherche-action participative comprenant des groupes de discussion avec plus de 200 femmes rurales de la province d’Al Haouz. Les principaux r\u00e9sultats de notre recherche pr\u00e9sent\u00e9s ici pourront nous aider \u00e0 mieux cerner les besoins des femmes rurales, afin qu\u2019elles puissent saisir chaque opportunit\u00e9 de jouir pleinement de leurs droits.<\/p>\r\n\r\n\r\n\r\n Moudawanat Al Osra (2004) est la loi marocaine sur le statut personnel\u00a0; elle est bas\u00e9e sur la Sharia islamique et le rite mal\u00e9kite<\/em>. Ce texte a remplac\u00e9 la Moudawana de 1956 qui, en fait, ne sugg\u00e9rait pas l’\u00e9galit\u00e9 des droits entre les sexes. Moudawanat Al Osra se compose de 400 articles de loi, qui visent \u00e0 prot\u00e9ger les droits des femmes et de leurs enfants.<\/p>\r\n\r\n\r\n\r\n Depuis que la nouvelle loi a \u00e9t\u00e9 adopt\u00e9e, sa mise en \u0153uvre dans les zones rurales se heurte \u00e0 divers obstacles tant en mati\u00e8re de sensibilisation que dans son application. Le projet de recherche a analys\u00e9 ces barri\u00e8res, ainsi que les diff\u00e9rents besoins soulev\u00e9s par les femmes dans cette r\u00e9gion montagneuse du Haut Atlas.<\/p>\r\n\r\n\r\n\r\n Principaux r\u00e9sultats<\/strong><\/p>\r\n\r\n\r\n\r\n Plus de 94% des femmes qui ont particip\u00e9 \u00e0 la recherche ont indiqu\u00e9 qu’elles n’avaient jamais entendu parler de la Moudawana auparavant, ce qui souligne le grand manque de sensibilisation \u00e0 la loi dans ces r\u00e9gions. La plupart des communaut\u00e9s ont d\u00e9clar\u00e9 que l’\u00e2ge l\u00e9gal du mariage \u00e9tait sup\u00e9rieur \u00e0 18 ans, mais que, dans les faits, la plupart des filles se marient encore entre 14 et 16 ans. La plupart des communaut\u00e9s ont indiqu\u00e9 qu’elles se sentaient \u00ab\u00a0laiss\u00e9es pour compte\u00a0\u00bb ; que les changements qui intervenaient \u00e0 l\u2019\u00e9chelon national atteignaient \u00e0 peine ces r\u00e9gions recul\u00e9es, et que m\u00eame si elles \u00e9taient conscientes de leurs droits, elles savaient qu’elles ne pourraient pas en jouir. En menant cette recherche d’\u00e9valuation, nous avons tent\u00e9 de comprendre les raisons sp\u00e9cifiques qui les ont pouss\u00e9s \u00e0 agir de la sorte.<\/p>\r\n\r\n\r\n\r\n Deux groupes de contr\u00f4le ont \u00e9t\u00e9 inclus dans la recherche ; le premier \u00e9tait compos\u00e9 d\u2019universitaires de la ville de Marrakech, le second, de membres de coop\u00e9ratives rurales avec lesquelles la HAF travaille en partenariat pour faire avancer des projets de d\u00e9veloppement. Les membres des coop\u00e9ratives ont indiqu\u00e9 qu’ils (elles) \u00e9taient plus ind\u00e9pendant(e)s socialement et financi\u00e8rement, dans diff\u00e9rents domaines de leur vie. Fait int\u00e9ressant, les \u00e9tudiants ont \u00e9voqu\u00e9 la question de l’utilisation de la Moudawana et de la promotion de l’\u00e9galit\u00e9 des droits des femmes (et des hommes) en tant que probl\u00e8me national, une d\u00e9marche dont ils partagent la responsabilit\u00e9. Ainsi, les \u00e9tudiants semblaient avoir \u00e0 c\u0153ur d\u2019en apprendre davantage et de transmettre leurs connaissances dans le but d\u2019aider d’autres femmes. La plupart des femmes des zones rurales ont \u00e9voqu\u00e9 la Moudawana comme \u00e9tant un probl\u00e8me d\u2019ordre personnel, ce qu\u2019elles souhaitent voir \u00e9voluer. Cependant, elles ont \u00e9galement exprim\u00e9 leur volont\u00e9 de transmettre aux autres les connaissances qu\u2019elles ont acquises.<\/p>\r\n\r\n\r\n\r\n Les femmes rurales de la province d’Al Haouz ont exprim\u00e9 des besoins diff\u00e9rents au cours des discussions. Nous pouvons subdiviser ces besoins en trois cat\u00e9gories principales : \u00e9ducation, soci\u00e9t\u00e9 et acc\u00e8s:<\/p>\r\n\r\n\r\n\r\n (1). \u00c9ducation : les taux \u00e9lev\u00e9s d’analphab\u00e9tisme parmi les femmes vivant en milieu rural demeurent l’un des probl\u00e8mes fondamentaux, les emp\u00eachant de conna\u00eetre ou d\u2019exercer leurs droits. Les femmes indiquent que cela est principalement d\u00fb \u00e0 l’in\u00e9galit\u00e9 dans l’acc\u00e8s \u00e0 l’\u00e9ducation.<\/p>\r\n\r\n\r\n\r\n (2). Soci\u00e9t\u00e9 : elles ont \u00e9voqu\u00e9 le ‘conflit’ entre la Loi nationale et les traditions locales qui pr\u00e9valent sur la premi\u00e8re dans la plupart des cas. Ce conflit a \u00e9t\u00e9 soulev\u00e9 comme l’un des plus grands obstacles \u00e0 la mise en \u0153uvre de la Moudawana dans ces zones. Le manque d’ind\u00e9pendance\u00a0: il est consid\u00e9r\u00e9 comme inappropri\u00e9 pour les femmes de quitter le village (peu importe comment) sans leurs maris. En outre, la violence et le viol ont \u00e9t\u00e9 soulev\u00e9s comme des obstacles qui emp\u00eachent particuli\u00e8rement les jeunes filles de faire valoir leurs droits.<\/p>\r\n\r\n\r\n\r\n (3). Acc\u00e8s : le manque d’acc\u00e8s physique \u00e0 l’information, le manque de routes et de moyens de transport ad\u00e9quats rendent difficiles l’acc\u00e8s des femmes aux diff\u00e9rents services publics et la comparution devant un juge (tel que cela est exig\u00e9 par de nombreuses l\u00e9gislations). De plus, les femmes manquent de libert\u00e9 financi\u00e8re, ce qui les emp\u00eache \u00e9galement d\u2019exercer leurs droits.<\/p>\r\n\r\n\r\n\r\n Toutes ces indications nous ont permis de mieux appr\u00e9hender les besoins de ces femmes ainsi que la meilleure d\u00e9marche \u00e0 suivre en vue de travailler sur la mise en pratique de la Moudawana dans ces zones retir\u00e9es.<\/p>\r\n\r\n\r\n\r\n Conclusion et recommandations<\/strong><\/p>\r\n\r\n\r\n\r\n La plupart des femmes ont indiqu\u00e9 que c’\u00e9tait la premi\u00e8re fois qu’elles ont eu l\u2019occasion de discuter de leurs droits, leurs inqui\u00e9tudes et de leurs objectifs personnels, ce qui \u00e9tait pour elles positif et encourageant. Autre fruit de nos ateliers participatifs, un groupe a commenc\u00e9 \u00e0 suivre des cours d’alphab\u00e9tisation, dans le but d\u2019\u00eatre capable de comprendre leurs droits. Une jeune fille de 16 ans, membre de leur communaut\u00e9, s’est port\u00e9e volontaire pour leur enseigner.<\/p>\r\n\r\n\r\n\r\n Un autre groupe de femmes a demand\u00e9 de l\u2019aide dans les d\u00e9marches administratives pour la cr\u00e9ation de leur propre coop\u00e9rative afin qu\u2019elles puissent tendre vers l\u2019ind\u00e9pendance financi\u00e8re. Nous prenons \u00e9galement acte du fait que, dans certains cas, l’effet de ce type d’intervention pourrait avoir une influence indirecte sur les participants, m\u00eame si nous n\u2019en verrions les fruits que plus tard.<\/p>\r\n\r\n\r\n\r\n Pour l’instant, nos principales recommandations sont les suivantes :<\/p>\r\n\r\n\r\n\r\n (1). N\u00e9cessit\u00e9 d’\u00e9valuer de mani\u00e8re inclusive les besoins et les connaissances de chaque communaut\u00e9 avec laquelle nous travaillons, afin de rendre la communaut\u00e9 plus impliqu\u00e9e et de soutenir la durabilit\u00e9 du projet.<\/p>\r\n\r\n\r\n\r\n (2). Impliquer les autorit\u00e9s locales. Nous avons travaill\u00e9 uniquement avec des communaut\u00e9s dont la HAF a gagn\u00e9 la confiance des dirigeants. Nous estimons qu’il est tr\u00e8s important d’avoir le m\u00eame processus de promotion de la sensibilisation de la Moudawana parmi ces dirigeants, tout en encourageant ces derniers \u00e0 discuter de l\u2019appui potentiel que cette Loi peut apporter au d\u00e9veloppement \u2013 par exemple, en ne devenant pas moins qu\u2019une source de rentr\u00e9es financi\u00e8res\u00a0!<\/p>\r\n\r\n\r\n\r\n (3). Encourager le leadership<\/em> local \u00e0 promouvoir le d\u00e9veloppement durable, par la cr\u00e9ation de liens entre les femmes rurales et urbaines.<\/p>\r\n\r\n\r\n\r\n Sur la base de toutes ces recommandations, nous avons con\u00e7u un programme qui vise \u00e0 r\u00e9unir des \u00e9tudiants universitaires et des femmes rurales, afin d\u2019\u00e9changer et d\u2019en apprendre davantage sur la Moudawana, et aussi de concevoir des impl\u00e9mentations locales de cette Loi, en fonction des besoins des villages respectifs.<\/p>\r\n\r\n\r\n\r\n Dans la plupart de ces r\u00e9gions, les hommes \u00e9taient traditionnellement les seuls \u00e0 \u00eatre impliqu\u00e9s dans les processus d\u2019identification des besoins et de prise de d\u00e9cision. En ciblant les femmes s\u00e9par\u00e9ment, cela nous a permis d\u2019aborder sous un angle diff\u00e9rent les besoins de la communaut\u00e9, et d\u2019\u00e9voquer diff\u00e9rentes mani\u00e8res de les combler. De plus, nous esp\u00e9rons que la Moudawana, en ce qu\u2019elle s\u2019inspire de la Sharia islamique, sera synonyme de levier d\u2019\u00e9mancipation des droits des femmes et de leur r\u00f4le dans la soci\u00e9t\u00e9, en particulier parmi les autres pays musulmans. \u00c0 travers cela, nous aspirons \u00e0 soutenir les changements sociaux individuels et collectifs, tant \u00e0 l\u2019\u00e9chelle locale que globale.<\/p>\r\n\r\n\r\n\r\n Gal Kramarski est \u00e9tudiante en Master des Arts au Programme de d\u00e9veloppement international \u00ab Glocal \u00bb, \u00e0 l’Universit\u00e9 h\u00e9bra\u00efque de J\u00e9rusalem. Elle a \u00e9t\u00e9 stagiaire \u00e0 la Fondation du Haut Atlas au Maroc entre ao\u00fbt 2017 et janvier 2018.<\/em><\/p>\r\n <\/p>\r\n\r\n\r\n\r\n\r\n\r\n