{"id":1887,"date":"2018-06-14T11:23:11","date_gmt":"2018-06-14T09:23:11","guid":{"rendered":"http:\/\/didouqen.com\/?p=1887"},"modified":"2018-06-14T11:23:11","modified_gmt":"2018-06-14T09:23:11","slug":"passeport-marocain-pour-le-paradis","status":"publish","type":"post","link":"https:\/\/wordpress-haf.ddev.site\/passeport-marocain-pour-le-paradis\/","title":{"rendered":"PASSEPORT MAROCAIN POUR LE PARADIS"},"content":{"rendered":"

\"gravesNote: this article, by\u00a0Asher Knafo, is currently only available in French. We hope to have it translated into English very soon.<\/em><\/p>\n

Pendant un an entre septembre 2012 et septembre 2013, la Fondation du Haut Atlas[1]<\/a>\u00a0(High Atlas Foundation \u2013 HAF) et ses partenaires ont r\u00e9alis\u00e9 un programme de pr\u00e9servation et d\u2019entretien des cimeti\u00e8res musulman, juif et chr\u00e9tien d\u2019Essaouira, ville portuaire sur la c\u00f4te atlantique du Maroc. Ces sites repr\u00e9sentent les souvenirs d\u2019un h\u00e9ritage riche et multiculturel o\u00f9 des personnes de diff\u00e9rentes confessions et origines ont partag\u00e9 une ville, une vie, un travail, une culture, une langue. Le Maroc incarne l\u2019int\u00e9gration naturelle de l\u2019unit\u00e9 et de la diversit\u00e9, la compr\u00e9hension du pass\u00e9 et son partage avec le monde pour un avenir de tol\u00e9rance de la diversit\u00e9 culturelle et religieuse. Ce projet \u00e9tait possible gr\u00e2ce au soutien du Fonds des Ambassadeurs am\u00e9ricains pour la pr\u00e9servation culturelle.<\/p>\n

Afin de perp\u00e9tuer la m\u00e9moire et de faire rena\u00eetre l\u2019esprit de cette\u00a0richesse culturelle, la Fondation a \u00e9tabli un partenariat avec les associations locales, les collectivit\u00e9s, les \u00e9coliers et les enseignants ainsi que les autorit\u00e9s d\u2019Essaouira durant la dur\u00e9e de la r\u00e9alisation du projet. Nous \u00e9tions tr\u00e8s fi\u00e8re aussi de pouvoir travailler avec M. Asher Knafo, fils de Mogador, \u00e9crivain, po\u00e8te et historien afin de mieux comprendre et de sauveguarder l\u2019information et des connaissances cach\u00e9s dans les \u00e9pitaphes du \u00ab\u00a0nouveau\u00a0\u00bb cimeti\u00e8re juif de Mogador, ancienne Essaouira.<\/p>\n

Propos sur le cimeti\u00e8re juif d’Essaouira dit “Le nouveau”<\/strong><\/p>\n

Cet article est \u00e9crit \u00e0 la suite de mon s\u00e9jour \u00e0 Essaouira du 28 avril 2013 au 17 mai 2013 \u00e0 l’invitation de la Fondation du Haut Atlas. Cette fondation, soutenue par le Fonds des Ambassadeurs Am\u00e9ricains pour le pr\u00e9servation culturelle, avait entrepris un projet de restauration des cimeti\u00e8res musulmans, chr\u00e9tiens et juifs d’Essaouira en int\u00e9grant les jeunes locaux dans leurs efforts. Durant ce s\u00e9jour j’ai pu poursuivre des travaux d’investigation que j’avais commenc\u00e9s de ma propre initiative trois ans auparavant. Pendant ce deuxi\u00e8me s\u00e9jour, j’ai \u00e9t\u00e9 t\u00e9moin des travaux de restauration effectu\u00e9s dans les cimeti\u00e8res. Ces travaux consistaient en d\u00e9frichement, nettoyage des tombes et des espaces entre les tombes et plantation d’arbres et de haies tout autour du cimeti\u00e8re.<\/p>\n

Mon pr\u00e9c\u00e9dent s\u00e9jour m’avait appris que la moiti\u00e9 du nouveau cimeti\u00e8re \u00e9tait non seulement envahie par les herbes mais surtout par les sables qui ont pratiquement enterr\u00e9 des centaines, voire des milliers de tombes.<\/p>\n

Il faut savoir que la population juive \u00e0 Essaouira a \u00e9t\u00e9 de tous temps \u00e9gale sinon sup\u00e9rieure \u00e0 celle des musulmans[2]<\/a>, ceci explique qu’il ait fallu deux immenses cimeti\u00e8res pour contenir toutes les tombes. La mission qui m’avait \u00e9t\u00e9 assign\u00e9e par\u00a0la HAF\u00a0\u00e9tait d’ordre tout \u00e0 fait technique. J’ai exprim\u00e9 mon d\u00e9sir de me d\u00e9dier plut\u00f4t \u00e0 retrouver les traces des po\u00e8tes sur les tombes, leurs \u00e9crits, les grandes figures qui se reposent pour l’\u00e9ternit\u00e9 dans ce cimeti\u00e8re. La direction de\u00a0la HAF\u00a0a accept\u00e9. C’est ainsi que j’ai pu entreprendre des travaux que j’ai consign\u00e9s sur papier et remis \u00e0\u00a0la HAF\u00a0: une liste des noms de famille, une liste des ouvrages cit\u00e9s sur les tombes, une autre des rabbins renomm\u00e9s figurant sur les tombes, des traductions de po\u00e8mes de maris pleurant leurs \u00e9pouses et d’autres de p\u00e8res pleurant leurs fils; tout cela figure dans le compte rendu de mon s\u00e9jour que j’ai \u00e9crit quelques jours apr\u00e8s mon d\u00e9part d’Essaouira.<\/p>\n

\"cleaning<\/p>\n

Ce s\u00e9jour a renfonc\u00e9 en moi la conviction que ce cimeti\u00e8re est certainement un des plus int\u00e9ressants sinon le plus int\u00e9ressant des cimeti\u00e8res juifs du Maroc, cela pour maintes raisons : historiques, sociologiques, \u00e9tymologiques, g\u00e9n\u00e9alogiques et autres. Le point le plus int\u00e9ressant est certainement le niveau extr\u00eamement \u00e9lev\u00e9 de la po\u00e9sie qu’ont peut trouver sur les tombes. Cette po\u00e9sie est le fait de la pens\u00e9e d’\u00e9minents po\u00e8tes, souvent rabbins qui ont compos\u00e9 des po\u00e8mes en souvenir des d\u00e9funts de la communaut\u00e9. A part l’int\u00e9r\u00eat que nous \u00e9prouvons pour cette lecture lyrique nous pouvons constater le talent, les astuces et les inventions d\u00e9ploy\u00e9s pour rehausser la qualit\u00e9 des textes.<\/p>\n

Une analyse approfondie de la prosodie de ces po\u00e8mes est\u00a0n\u00e9cessaire, mais d\u00e9j\u00e0 nous pouvons dire que les po\u00e8tes ont puis\u00e9 largement dans toutes les formes lyriques des grands po\u00e8tes juifs du Maroc, dont Rabbi David Hassine de M\u00e9kn\u00e8s, Rabbi Moch\u00e9 Rapha\u00ebl Elbaz de Sefrou, Rabbi Yaacov Abehssera d’Erfoud et bien d’autres. D’ailleurs un des po\u00e8tes principaux du cimeti\u00e8re d’Essaouira, Rabbi David Elka\u00efm, est reconnu aujourd’hui comme l’un des plus grands po\u00e8tes du monde juif.<\/p>\n

On ne peut pas dire que les po\u00e8mes ou les \u00e9pitaphes qui se trouvent sur les tombes aient une forme sp\u00e9ciale qui les d\u00e9signe automatiquement comme telles, car souvent, les po\u00e8tes\u00a0\u00e9crivaient d’abord un po\u00e8me avec des r\u00e9flexions sur la condition humaine et\u00a0des consid\u00e9rations religieuses ou autres et c’est seulement apr\u00e8s que venaient les \u00e9l\u00e9ments \u00e9l\u00e9giaques, eux aussi suivis par le nom, les titres, la g\u00e9n\u00e9alogie et la date du d\u00e9c\u00e8s du d\u00e9funt. Les po\u00e8mes sont compos\u00e9s comme tous autres po\u00e8mes avec le m\u00eame genre de rimes (les rimes riches ou les rimes uniques, c’est-\u00e0-dire les po\u00e8mes dont les vers se terminent par la m\u00eame rime) les acrostiches normaux ou doubles, les jeux de mots savants ou calembours, l’insertion de versets ou de parties de versets dans les po\u00e8mes, les versets l\u00e9g\u00e8rement chang\u00e9s pour servir les intentions du po\u00e8te, les allusions se rapportant au nom des d\u00e9funts ou \u00e0 leurs ascendants, les superlatifs, et surtout les innovations dans la langue c’est-\u00e0-dire la cr\u00e9ation de mots nouveaux d\u00e9rivant de mots ou de noms existants. Pour expliquer cela il aurait fallu que cet article soit \u00e9crit en h\u00e9breu. J’essaierai quand m\u00eame en donnant un exemple unique : dans le Cantique des Cantiques il est \u00e9crit[3]<\/a>\u00a0: “Voici le lit (nuptial) du Roi Salomon”, sur certaines tombes \u00e0 Essaouira on trouvera le m\u00eame verset, au lieu du mot mitato (qui veut dire : le lit de\u2026) nous trouverons le mot mithato (qui veut dire : la mort de…) et ainsi on obtient :”Voici le lit (mortel) de Salomon”. A l’oreille, les deux phrases sont identiques. Voici donc comment le po\u00e8te en rempla\u00e7ant une lettre par une autre ayant la m\u00eame consonance, r\u00e9ussit \u00e0 changer compl\u00e8tement le sens de la phrase. Il va sans dire que dans le cas de ce verset, le d\u00e9funt se nommait Salomon.<\/p>\n

Cette\u00a0facult\u00e9 d’innover des mots ou des sens de mots sont les faits d’une langue vivante et non d’une langue morte comme nous verrons par la suite.<\/p>\n

Dans mon article – Heureux sois-tu, pays aux nombreux fils et aux nombreuses tombes[4]<\/a>, je souligne que toutes[5]<\/a>\u00a0les tombes des cimeti\u00e8res juifs d’Essaouira, sont \u00e9crites en H\u00e9breu.<\/p>\n

Il faut dire que les tombes de ces cimeti\u00e8res y ont \u00e9t\u00e9 creus\u00e9es depuis la cr\u00e9ation d’Essaouira en 1764 par le Sultan Sidi Mohamed jusqu’au d\u00e9part des Juifs pour diff\u00e9rentes direction et surtout pour Isra\u00ebl dans les ann\u00e9es 60 du 20\u00e8me si\u00e8cle. Or pendant cette p\u00e9riode l’H\u00e9breu \u00e9tait consid\u00e9r\u00e9 comme une langue morte, tout comme le Grec ancien et le Latin. L’expression “c’est de l’h\u00e9breu pour moi” d\u00e9montre \u00e0 quel point l’H\u00e9breu \u00e9tait une langue que personne ne parlait ni ne comprenait. Les Juifs eux-m\u00eames, pour la plupart, ne comprenaient pas un mot d’h\u00e9breu. Chose curieuse, ils le lisaient parfaitement dans les livres de pri\u00e8res ou dans la Thora, mais c’\u00e9tait une lecture automatique dict\u00e9e par le devoir et les lois religieuses. Les enfants \u00e0 la “sla”[6]<\/a>apprenaient \u00e0 lire mais n’apprenaient pas la langue. M\u00eame pendant l’enseignement de la Thora, le ma\u00eetre traduisait en arabe juste pour que l’enfant comprenne ce qu’il venait de lire, mais il n’en r\u00e9sultait pas un enseignement syst\u00e9matique de l’h\u00e9breu avec ses r\u00e8gles, sa grammaire et son usage. Devenu adulte, l’\u00e9l\u00e8ve savait parfaitement lire mais il ne comprenait pas, ou comprenait tr\u00e8s peu ce qu’il lisait. Ceci concerne les hommes, quant aux femmes, elles\u00a0 ne savaient m\u00eame pas lire, car elles n’\u00e9taient pas tenues de prier ou d’\u00e9tudier la Thora et par cons\u00e9quent, elles n’allaient pas \u00e0 la “sla” chez le rabbin<\/p>\n

\"JewishQui savait l’H\u00e9breu? Les rabbins et les \u00e9rudits. Les auteurs d’ouvrages sur la Thora, comme rabbi Yossef Knafo, rabbi Avraham Coriat, rabbi Ytshak Coriat (tous rabbins-auteurs d’Essaouira, mais il en allait de m\u00eame pour les rabbins du reste du Maroc) \u00e9crivaient leurs livres en H\u00e9breu et des fois en Jud\u00e9o arabe \u00e9crit en lettres h\u00e9bra\u00efques. L’usage de la langue h\u00e9bra\u00efque par les rabbins et \u00e9rudits, \u00e9tait courant dans toutes les communaut\u00e9s juives du monde et elle leur permettait de correspondre. Les “responsa” sont les r\u00e9ponses aux questions de jurisprudence que les rabbins de toute la Diaspora se posaient d’un pays \u00e0 l’autre, et les rabbins du Maroc \u00e9taient des plus sollicit\u00e9s.<\/p>\n

Nous avons donc des tombes \u00e9crites en H\u00e9breu alors que seulement une petite minorit\u00e9 de personnes parle la langue h\u00e9bra\u00efque d\u00e9nomm\u00e9e aussi\u00a0Lachone Hakodech,\u00a0la langue sacr\u00e9e ou plut\u00f4t la langue du Sacr\u00e9.<\/p>\n

Mais nous avons aussi la grande masse qui lisait l’H\u00e9breu sans le comprendre (les hommes) et d’autres qui ne savaient ni le lire ni le comprendre (les femmes). Ajoutons \u00e0 cela, que tous les membres de la soci\u00e9t\u00e9 juive avaient un v\u00e9ritable culte des morts et qu’ils venaient tr\u00e8s souvent visiter leurs morts et allumer une bougie sur leurs tombes. Les familles prenaient grand soin des tombes, les lavaient, les astiquaient, les \u00a0chaulaient. Il est vraisemblable que chacun des membres de la famille du d\u00e9funt s’\u00e9tait fait expliquer le sens des mots figurant sur la tombe, mais bien s\u00fbr cela ne rempla\u00e7ait nullement le besoin de lire et de comprendre ce qui \u00e9tait dit de leurs chers.<\/p>\n

Les familles perdaient un parent s’adressaient aux meilleurs po\u00e8tes pour que ceux-ci couvrent de louange leur cher disparu.<\/p>\n

Pourquoi en \u00e9tait-il ainsi ? Pourquoi ne commandaient-ils pas leurs \u00e9pitaphes en Jud\u00e9o arabe, langue qu’ils comprenaient et savaient lire ? Pourquoi, \u00e0 la venue du Protectorat fran\u00e7ais, ne command\u00e8rent-ils pas une \u00e9pitaphe en langue fran\u00e7aise que beaucoup comprenaient, femmes incluses ?<\/p>\n

A mon avis, la raison principale de ce choix d\u00e9lib\u00e9r\u00e9 de l’H\u00e9breu, venait du fait que les \u00e9pitaphes ne leur \u00e9taient pas destin\u00e9es. Elles \u00e9taient destin\u00e9es \u00e0 Dieu lui m\u00eame ou \u00e0 son tribunal c\u00e9leste qui juge chaque \u00e2me qui arrive au ciel apr\u00e8s avoir quitt\u00e9 son corps terrestre et selon la croyance juive continue \u00e0 \u00eatre jug\u00e9e longtemps apr\u00e8s la mort et \u00a0peut pendant son “existence mortelle” graver des \u00e9chelons pour s’approcher de plus en plus de Dieu.<\/p>\n

Les textes grav\u00e9s sur les tombes \u00e9taient adress\u00e9s \u00e0 Dieu et cela dictait leur contenu. Une des qualit\u00e9s les plus courantes qui se trouve sur les tombes est :\u00a0Nassa v\u00e9natane b\u00e9\u00e9mouna,\u00a0litt\u00e9ralement : “a men\u00e9 des pourparlers dans la confiance” mais le sens de ces trois mots est : il a \u00e9t\u00e9 un commer\u00e7ant honn\u00eate. Or, connaissant la vie de certains d\u00e9funts auxquels \u00e9tait attribu\u00e9e cette qualit\u00e9, ils \u00e9taient loin d’\u00eatre commer\u00e7ants, alors pourquoi les affubler d’une qualit\u00e9 qui ne les concernait pas ? L’explication qui s’impose tout de suite est que c’est une qualit\u00e9 dite au figur\u00e9 et qui veut dire que le d\u00e9funt \u00e9tait fonci\u00e8rement honn\u00eate dans tous ses rapports avec son prochain.<\/p>\n

Mais alors, pourquoi les po\u00e8tes insistaient-ils \u00e0 se servir de cette expression et pas d’une autre,\u00a0plus appropri\u00e9e \u00e0 la personne d\u00e9funte ? La r\u00e9ponse se trouve dans le Talmud[7]<\/a>\u00a0o\u00f9 il est dit : “Ainsi dit Rabba[8]<\/a>: Lorsque l’on fait venir l’homme[9]<\/a>\u00a0pour le juger, on lui demande :\u00a0Nassata v\u00e9natata b\u00e9\u00e9mouna\u00a0?\u00a0(As-tu \u00e9t\u00e9 un commer\u00e7ant honn\u00eate)? As-tu fix\u00e9 des heures pour l’\u00e9tude de\u00a0la Thora\u00a0? As-tu procr\u00e9\u00e9 ? ) On peut voir, donc, que la premi\u00e8re question qu’on pose \u00e0 l’homme sur le parcours de sa vie se rapporte \u00e0 son honn\u00eatet\u00e9. L’\u00e9tude de\u00a0la Thora\u00a0ne vient qu’en deuxi\u00e8me plan.<\/p>\n

\"Asher<\/p>\n

Et voil\u00e0 pourquoi on \u00e9crivait sur la tombe : Nassa v\u00e9natane b\u00e9\u00e9mouna, expression qui est en fait une r\u00e9ponse \u00e0\u00a0 la premi\u00e8re question\u00a0 qui lui sera pos\u00e9e. Pour r\u00e9pondre \u00e0 la deuxi\u00e8me question, on trouvera tr\u00e8s souvent \u00e9crit que le d\u00e9funt \u00e9tudiait tous les jours la Thora. La troisi\u00e8me question est “s’il avait procr\u00e9\u00e9”. Cette question pourrait para\u00eetre superflue, \u00a0mais les rabbins nous expliquent que\u00a0 dans ce texte, “procr\u00e9er” signifie : \u00e9lever ses enfants dans les chemins de la Thora. C’est pourquoi nous lirons tr\u00e8s souvent que le d\u00e9funt a laiss\u00e9 des enfants qui, comme lui, s’adonnent \u00e0 l’\u00e9tude de la Thora.<\/p>\n

Dans cet esprit nous trouvons souvent l’expression :\u00a0Mashkim oumaariv l\u00e9bet haknesset\u00a0(Premier, le matin \u00e0 la synagogue, il est le dernier le soir, \u00e0 la quitter) destin\u00e9e \u00e0 prouver que\u00a0le d\u00e9funt \u00e9tait d’une grande pi\u00e9t\u00e9.<\/p>\n

Une question s’impose : Et si l\u00e0-bas, devant le tribunal, on lui disait :<\/p>\n

“Il est \u00e9crit sur ta tombe : Nassa v\u00e9natane b\u00e9\u00e9mouna, et que tu as consacr\u00e9 tous les jours du temps \u00e0 l’\u00e9tude de la Thora, mais nous savons que \u00e7a n’a pas toujours \u00e9t\u00e9 ainsi !”<\/p>\n

“Il en a toujours \u00e9t\u00e9 ainsi, j’ai des t\u00e9moins !”<\/p>\n

“Et qui sont tes t\u00e9moins ?”<\/p>\n

“Ceux qui ont \u00e9crit ces mots et tous ceux qui viennent se recueillir sur ma tombe !”<\/p>\n

“Et pourquoi crois-tu que nous devons accepter tes t\u00e9moins ?”<\/p>\n

“Mais tout simplement parce que c’est \u00e9crit dans la Thora !”<\/p>\n

“Peux-tu nous expliquer ?”<\/p>\n

“Il est \u00e9crit dans la Thora[10]<\/a>\u00a0: “\u2026 c’est par la d\u00e9position de deux t\u00e9moins, ou de trois, qu’un fait sera \u00e9tabli.”<\/p>\n

Mais l’\u00e2me garde son principal atout pour la fin :<\/p>\n

“Dans les Pr\u00e9ceptes des Anciens, une question cruciale est pos\u00e9e[11]<\/a>\u00a0; Quel est l’homme qui plait \u00e0 Dieu ? La r\u00e9ponse est : celui qui plait aux humains. Or, regardez ce qui est \u00e9crit sur ma tombe : Rouah Habriot noha hemeno \u2013 Il (elle) a plu aux humains.<\/p>\n

Ainsi, tout se qui est \u00e9crit sur les tombes juives n’est qu’un plaidoyer devant le tribunal c\u00e9leste, et il doit se d\u00e9rouler en “Lachone Hakodech” – la langue du Sacr\u00e9<\/p>\n

Autrement dit : les tombes au cimeti\u00e8re juif d’Essaouira sont\u00a0un passeport pour le “Gan Eden” (paradis) et voil\u00e0 pourquoi le rabbin, dans son oraison fun\u00e8bre le jour de la mort, d\u00e9cr\u00e8te :<\/p>\n

“B\u00e9Gan Eden t\u00e9h\u00e9 menouhato[12]<\/a>” (son \u00e2me reposera en paix au paradis).<\/p>\n

Asher Knafo
\n<\/strong>Septembre 2013<\/strong><\/p>\n

Asher Knafo<\/strong>\u00a0est \u00e9crivain, po\u00e8te, chercheur de l\u2019histoire des juifs marocains et fils de Mogador. Il est l’auteur de plusieurs ouvrages de fiction et non-fiction bas\u00e9e sur la vie des Juifs du Maroc.<\/p>\n

[1] \u00a0https:\/\/highatlasfoundation.org\/projects\/cultural-projects<\/a><\/p>\n

[2]Le po\u00e8te mogadorien \u00a0I. D. Knafo \u00e9crivait en 1990 : “Il y a cent ans, Mogador comptait 25000 habitants dont 13000 Juifs. Il y a 35 ans 7000 Juifs. Il y a 25 ans 5000.” ( le M\u00e9morial de Mogador, dans la pr\u00e9face) J\u00e9rusalem 1992.<\/p>\n

[3] Chapitre 3 versets 7-8<\/p>\n

[4] \u00a0La bienvenue et l’adieu, 3\u00e8me tome, p. 157 ed. La crois\u00e9e des chemins, Casablanca 2010 et aussi en H\u00e9breu dans Brit 29 \u2013 La revue des Juifs du Maroc p.54<\/p>\n

[5] Exception faite de deux ou trois tombes<\/p>\n

[6] \u00a0L’\u00e9quivalent du “Heder” – \u00e9cole pour petits enfants tenue par un rabbin<\/p>\n

[7] \u00a0Chabbat 31<\/p>\n

[8] \u00a0Rabbin du Talmud<\/p>\n

[9] \u00a0Apr\u00e8s sa mort<\/p>\n

[10] \u00a0Deut\u00e9ronome 19 \u2013 16 (Traduction Zadoc Kahn)<\/p>\n

[11] \u00a0Pr\u00e9ceptes des anciens, chap. 3<\/p>\n

[12] Se trouve dans El mal\u00e9 rahamim – la pri\u00e8re des morts<\/p>\n","protected":false},"excerpt":{"rendered":"

Note: this article, by\u00a0Asher Knafo, is currently only available in French. We hope to have it translated into English very soon. Pendant un an entre septembre 2012 et septembre 2013, la Fondation du Haut Atlas[1]\u00a0(High Atlas Foundation \u2013 HAF) et ses partenaires ont r\u00e9alis\u00e9 un programme de pr\u00e9servation et d\u2019entretien des cimeti\u00e8res musulman, juif et<\/p>\n","protected":false},"author":6,"featured_media":1888,"comment_status":"open","ping_status":"closed","sticky":false,"template":"","format":"standard","meta":[],"categories":[46],"tags":[],"jetpack_featured_media_url":"https:\/\/wordpress-haf.ddev.site\/wp-content\/uploads\/2018\/11\/reduced-p1000308-1.jpg","_links":{"self":[{"href":"https:\/\/wordpress-haf.ddev.site\/wp-json\/wp\/v2\/posts\/1887"}],"collection":[{"href":"https:\/\/wordpress-haf.ddev.site\/wp-json\/wp\/v2\/posts"}],"about":[{"href":"https:\/\/wordpress-haf.ddev.site\/wp-json\/wp\/v2\/types\/post"}],"author":[{"embeddable":true,"href":"https:\/\/wordpress-haf.ddev.site\/wp-json\/wp\/v2\/users\/6"}],"replies":[{"embeddable":true,"href":"https:\/\/wordpress-haf.ddev.site\/wp-json\/wp\/v2\/comments?post=1887"}],"version-history":[{"count":0,"href":"https:\/\/wordpress-haf.ddev.site\/wp-json\/wp\/v2\/posts\/1887\/revisions"}],"wp:featuredmedia":[{"embeddable":true,"href":"https:\/\/wordpress-haf.ddev.site\/wp-json\/wp\/v2\/media\/1888"}],"wp:attachment":[{"href":"https:\/\/wordpress-haf.ddev.site\/wp-json\/wp\/v2\/media?parent=1887"}],"wp:term":[{"taxonomy":"category","embeddable":true,"href":"https:\/\/wordpress-haf.ddev.site\/wp-json\/wp\/v2\/categories?post=1887"},{"taxonomy":"post_tag","embeddable":true,"href":"https:\/\/wordpress-haf.ddev.site\/wp-json\/wp\/v2\/tags?post=1887"}],"curies":[{"name":"wp","href":"https:\/\/api.w.org\/{rel}","templated":true}]}}